LOI ORGANIQUE FIXANT L’ORGANISATION ET LE FONCTIONNEMENT DES SERVICES PUBLICS DU POUVOIR CENTRAL, DES PROVINCES ET DES ENTITES TERRITORIALES DECENTRALISEES

LOI ORGANIQUE FIXANT L’ORGANISATION ET LE FONCTIONNEMENT DES SERVICES PUBLICS DU POUVOIR CENTRAL, DES PROVINCES ET DES ENTITES TERRITORIALES DECENTRALISEES

EXPOSE DES MOTIFS

La présente Loi organique fixe l’organisation et le fonctionnement des services publics du pouvoir central, des provinces et des entités territoriales décentralisées, en application de l’article 194 de la Constitution de la République Démocratique du Congo.

En effet, la Constitution du 18 février 2006, en ses articles 3 alinéa 3, 123 point 1, 202 et 204, consacre les principes de la libre administration et de l’autonomie des provinces et des entités territoriales décentralisées dans la gestion de leurs ressources économiques, humaines, financières et techniques.

Pour matérialiser ces principes, l’organisation et le fonctionnement des services publics du pouvoir central, des provinces et des entités territoriales décentralisées sont indispensables afin de permettre à chaque échelon du pouvoir étatique de disposer d’un cadre organique et fonctionnel cohérent.

De prime abord, la présente Loi organique circonscrit le sens des concepts et l’essentiel des principes fondamentaux utilisés.

Elle fixe ensuite le cadre organique des services publics du pouvoir central, des provinces et des entités territoriales décentralisées.

Elle détermine enfin le régime du patrimoine et des ressources des services publics à ces trois échelons du pouvoir d’Etat.

La présente Loi organique s’articule autour de cinq titres, à savoir :

TITRE Ier : Des dispositions générales

TITRE II  : Des services publics du pouvoir central

TITRE III : Des services publics des provinces et des entités territoriales décentralisées

TITRE IV : Du patrimoine et des ressources des services publics du  pouvoir central, des provinces et des entités territoriales décentralisées

TITRE V  : Des dispositions transitoires et finales.

Telle est l’économie générale de la présente Loi.

LOI ORGANIQUE N° 16/001  DU  03  MAI  2016  FIXANT

L’ORGANISATION ET LE FONCTIONNEMENT DES SERVICES PUBLICS DU POUVOIR CENTRAL, DES PROVINCES ET DES ENTITES TERRITORIALES DECENTRALISEES

L’Assemblée nationale et le Sénat ont adopté ;

Le Président de la République promulgue la loi dont la teneur suit :

TITRE Ier : DES DISPOSITIONS GENERALES

CHAPITRE 1er : DU CHAMP D’APPLICATION ET DES DEFINITIONS

Article 1er :

La présente Loi organique s’applique aux services publics du pouvoir central, des provinces et des entités territoriales décentralisées. Ils sont centraux ou déconcentrés.

Article 2 :

Les services publics du pouvoir central comprennent :

  1. l’Administration rattachée au Président de la République ;
  2. l’Administration rattachée au Premier Ministre ;
  3. l’Administration de l’Assemblée Nationale ;
  4. l’Administration du Sénat ;
  5. l’Administration de la Cour Constitutionnelle et du Parquet général près l a Cour Constitutionnelle ;
  6. l’Administration des Ministères ;
  7. l’Administration des juridictions de l’ordre judiciaire et de l’ordre administratif ;
  8. l’Administration des Parquets près les juridictions de l’ordre judiciaire et de l’ordre administratif ;
  9. l’Administration de la Cour des comptes.

Article 3 :

Les services publics de la province comprennent :

  1. l’Administration rattachée au Gouverneur de province ;
  2. l’Administration de l’Assemblée provinciale ;
  3. l’Administration des Ministère provinciaux ;

Article 4 :

Les services publics des entités territoriales décentralisées comprennent, selon le cas :

  1. l’Administration des Conseils des villes, communes, secteurs et chefferies ;
  2. l’Administration des Collèges exécutifs des villes, communes, secteurs et chefferies.

Article 5 :

Aux termes de la présente Loi, on entend par :

  1. administration publique : ensemble des services administratifs du pouvoir central, des provinces et des entités territoriales décentralisées destinés à exécuter des tâches étatiques en vue de la satisfaction des besoins d’intérêt général ;
  2. agent public ou agent : toute personne qui exerce une activité publique de l’Etat et/ou rémunérée par l’Etat ;
  3. autorité compétente : tout agent public investi du pouvoir de recourir à l’usage de la puissance publique par voie de règlementation ou de prestation ;
  4. cadre organique : ensemble des postes hiérarchisés au sein des services publics du pouvoir central, des provinces et des entités territoriales décentralisées ;
  5. organisme public : toute structure de gestion investie d’une mission de service public ;
  6. service public : tout organisme ou toute activité d’intérêt général relevant de l’Administration publique ;
  7. service public déconcentré : service qui assure par délégation le relais sur le plan provincial et local des décisions prises par le pouvoir central, la province ou l’entité territoriale décentralisée.
  8. usager : toute personne physique ou morale qui recourt aux prestations d’un service public.

CHAPITRE 2 : DES PRINCIPES FONDAMENTAUX

Article 6 :

Les services publics sont régis suivant les principes fondamentaux ci-après :

  1. égalité ;
  2. neutralité ;
  3. légalité ;
  4. continuité ;
  5. spécialité ;
  6. adaptabilité.

Article 7 :

Les personnes se trouvant dans une situation similaire vis-à-vis du service public sont traitées de manière égale, sans discrimination aucune, conformément au principe de l’égalité des citoyens devant la Loi.

Article 8 :

L’Administration est au service de l’intérêt général.

Elle n’exerce sur ses agents aucun traitement discriminatoire.

Toute discrimination fondée sur l’origine, la race, le sexe, la religion, l’ethnie, la tribu, les convictions politiques ou philosophiques ou sur d’autres considérations liées à la personne est prohibée dans le service public.

Le service public demeure apolitique, neutre et impartial. Nul ne peut le détourner à des fins personnelles ou partisanes.

Article 9 :

Le service public est assuré avec efficacité et efficience dans le strict respect de la Loi.

Les décisions administratives sont prises en conformité avec les Lois et les règlements en vigueur.

Article 10 :

Le service public est continu et assuré en permanence dans toutes ses composantes.

Le non-respect du principe de continuité peut engager la responsabilité du service public envers tout intéressé ayant subi un préjudice de ce fait.

Article 11 :

Le service public répond à un besoin précis d’intérêt général et dispose d’une compétence spécifique et particulière.

Article 12 :

Le service public est tenu de s’adapter aux circonstances, changements et évolutions notamment techniques pouvant affecter son organisation et son fonctionnement face aux besoins d’intérêt général.

Article 13 :

L’entreprise, dont l’activité présente les caractères d’un service public, est soumise aux principes fondamentaux régissant les services publics tels que définis dans la présente Loi.

Article 14 :

Le pouvoir central, la province et l’entité territoriale décentralisée peuvent, dans le respect de la Loi, déléguer leurs missions à des organismes publics ou privés assimilés.

Il ne peut y avoir de délégation de services publics pour les missions régaliennes de l’Etat, notamment la justice, la sécurité et la défense.

Article 15 :

Les prestations fournies aux usagers par le service public tiennent compte notamment des critères suivants :

  1. proximité et accessibilité ;
  2. participation et consultation ;
  3. qualité et efficience ;
  4. évaluation ;
  5. transparence et information ;
  6. célérité et délais de réponse ;
  7. fiabilité et confidentialité des informations.

Article 16 :

Le service public crée et assure aux usagers les conditions minimales de proximité et d’accessibilité.

Article 17 :

Le service public assure, dans son fonctionnement, la participation des populations en impliquant la société civile et d’autres acteurs à travers des structures consultatives ou des organes conseils.

Article 18 :

Le service public fournit des prestations au meilleur rapport qualité/coût, en utilisant de la façon optimale les ressources disponibles.

Le coût des prestations du service public tient compte du niveau du revenu de la population.

Article 19 :

Le service public prévoit des mécanismes d’évaluation périodique des prestations et des services offerts au public.

L’évaluation se fonde sur des objectifs et des programmes d’activités, assortis d’indicateurs et de critères de performance.

Les résultats des évaluations sont diffusés, notamment à l’occasion de la publication obligatoire des rapports annuels d’activités.

Article 20 :

Le service public rend disponibles les informations nécessaires sur les actes et procédures relevant de sa compétence ainsi que les informations permettant d’apprécier sa gestion.

Il informe l’usager de toute décision prise à son égard en indiquant le motif et en précisant les voies de recours en cas de contestation.

Il crée ou renforce les services d’accueil et d’information des usagers, afin de leur faciliter l’accès aux prestations et de recueillir leurs avis, suggestions ou réclamations.

Article 21 :

Dans l’exécution de ses prestations, le service public fixe et respecte les délais légaux et réglementaires.

A l’expiration du délai imparti, le silence vaut tacite acceptation, sauf exception définie par la Loi ou le règlement.

Article 22 :

Les services publics du pouvoir central, des provinces et des entités territoriales décentralisées assurent, selon le cas, la protection sociale fondée sur les principes d’équité et de solidarité entre générations.

Article 23 :

Les informations nominatives ou celles permettant d’identifier, sous quelque forme que ce soit, directement ou indirectement, les personnes auxquelles elles s’appliquent, ne peuvent faire l’objet de traitements, notamment automatisés, de nature à porter atteinte à la vie privée, aux libertés individuelles ou aux droits de l’homme.

Toute personne justifiant de son identité a le droit de connaître, de contester et, au besoin, de faire rectifier les informations nominatives la concernant, ainsi que l’exploitation qui en est faite.

Toutefois, seules la Police et la Justice sont autorisées, conformément à la Loi, à traiter les informations dans un fichier informatisé contenant des informations sur la vie privée des personnes.

TITRE II : DES SERVICES PUBLICS DU POUVOIR CENTRAL

CHAPITRE 1er : DE L’ORGANISATION DES SERVICES PUBLICS DU POUVOIR CENTRAL

Article 24 :

Les services publics du pouvoir central sont constitués de l’ensemble des services tels qu’énumérés à l’article 2 de la présente Loi.

Ils sont hiérarchisés de la manière suivante :

  1. Secrétariat général ;
  2. Direction ;
  3. Division ;
  4. Bureau.

Article 25 :

Les services publics du pouvoir central sont créés et, le cas échéant, dissouts, par Décret du Premier Ministre, délibéré en Conseil des Ministres, sur proposition du Ministre ayant le secteur d’activité concerné dans ses attributions.

CHAPITRE II : DU FONCTIONNEMENT DES SERVICES PUBLICS DU POUVOIR CENTRAL

Article 26 :

Les services publics du pouvoir central sont placés sous la responsabilité de l’autorité hiérarchique à laquelle ils sont rattachés.

Ils sont dirigés par un fonctionnaire ayant le grade de Secrétaire général de l’Administration publique.

Article 27 :

Le pouvoir central, pour des raisons de proximité et d’efficacité, déploie des services publics déconcentrés en province et dans l’entité territoriale décentralisée.

TITRE III : DES SERVICES PUBLICS DES PROVINCES ET DES ENTITES TERRITORIALES DECENTRALISEES

CHAPITRE 1er : DE L’ORGANISATION DES SERVICES PUBLICS DES PROVINCES ET DES ENTITES TERRITORIALES DECENTRALISEES

Article 28 :

Les services publics des provinces sont constitués de l’ensemble des services tels qu’énumérés à l’article 3 de la présente Loi.

Ils sont hiérarchisés de la manière suivante :

  1. Secrétariat provincial ;
  2. Division provinciale,
  3. Bureau.

Article 29 :

Les services publics de la province sont créés et, le cas échéant, dissouts par Arrêté du Gouverneur de province délibéré en Conseil des ministres, sur proposition du Ministre provincial ayant le secteur d’activité concerné dans ses attributions.

Article 30 :

Les services publics de l’entité territoriale décentralisée sont constitués de l’ensemble des services tels qu’énumérés à l’article 4 de la présente Loi.

Ils sont hiérarchisés de la manière suivante :

  1. Division locale ;
  2. Bureau local.

Ils sont créés par Décision conformément à la Loi organique portant composition, organisation et fonctionnement des entités territoriales décentralisées et leur rapport avec l’Etat et les provinces.

CHAPITRE 2 : DU FONCTIONNEMENT DES SERVICES PUBLICS DES PROVINCES ET DES ENTITES TERRITORIALES DECENTRALISEES

Article 31 :

Les services publics de la province sont placés sous l’autorité du Gouverneur de province.

Ils sont dirigés par un fonctionnaire ayant le grade de Directeur de l’Administration publique.

La province, pour besoin de proximité, déploie des services déconcentrés au niveau des entités territoriales décentralisées et déconcentrées.

Article 32 :

Les services publics de l’entité territoriale décentralisée sont placés sous l’autorité du Collège exécutif.

Ils sont dirigés par un fonctionnaire ayant le grade de Chef de division de l’Administration publique.

TITRE IV : DU PATRIMOINE ET DES RESSOURCES FINANCIERES DES SERVICES PUBLICS DU POUVOIRS CENTRAL, DES PROVINCES ET DES ENTITES TERRITORIALES DECENTRALISEES

CHAPITRE 1er : DU PATRIMOINE

Article 33 :

Le pouvoir central, les provinces et les entités territoriales décentralisées acquièrent des biens nécessaires au fonctionnement de leurs services respectifs pour la satisfaction des besoins d’intérêt général.

Article 34 :

Nul ne peut détourner les biens publics à des fins privées ou politiques.

Article 35 :

L’acquisition des biens et le recours aux prestations des services et travaux sont organisés conformément à la législation en vigueur.

Article 36 :

Le patrimoine d’un service public est constitué des biens affectés et/ou acquis, selon le cas, par le pouvoir central, la province et l’entité territoriale décentralisée pour son fonctionnement.

Article 37 :

Les biens du domaine du pouvoir central, de la province et de l’entité territoriale décentralisée sont mis à la disposition des services publics, selon leurs besoins de fonctionnement, par un acte d’affectation signé par l’autorité compétente.

CHAPITRE 2 : DES RESSOURCES FINANCIERES

Article 38 :

Les ressources financières du pouvoir central, des provinces et des entités territoriales décentralisées sont distinctes.

Article 39 :

Les services publics du pouvoir central, des provinces et des entités territoriales décentralisées émargent respectivement au budget du pouvoir central, des provinces et des entités territoriales décentralisées.

TITRE V : DES DISPOSITIONS TRANSITOIRES ET FINALES

Article 40 :

Dans les six mois de l’entrée en vigueur de la présente Loi, le pouvoir central, les provinces et les entités territoriales décentralisées adaptent l’organisation et le fonctionnement de leurs services publics aux dispositions de la présente Loi.

Article 41 :

A dater de la promulgation de la présente Loi organique, en concertation avec les provinces, le pouvoir central procède à la répartition des ressources humaines.

Article 42 :

Sont abrogées toutes les dispositions antérieures contraires à la présente Loi.

Article 43 :

La présente Loi entre en vigueur à la date de sa promulgation.

Fait à Kinshasa, le 03 mai 2016

 Joseph KABILA KABANGE